Dans le cadre de nos études sur les substances marines à activité biologique, nous avions remarqué que l'extrait CH₂Cl₂ de l'ascidie guadeloupéenne Aplidium antillense Gravier, était légèrement cytotoxique (CI₅₀ = 39 µg/ml sur cellules KB) et possédait une activité antibactérienne appréciable principalement vis-à-vis de germes Gram positif.Nous avons isolé de ce tunicier, deux substances: la géranyl-hydroquinone (GHQ) et son dérivé de cyclisation, le cordiachromène A (CCA). La GHQ a été trouvée pour la première fois dans un Aplidium mexicain non identifié (1); elle a été signalée depuis dans des végétaux de la famille des Borraginacées (2,3) et des Hydrophyllacées (4). Le CCA a de son côté été signalé dans une Borraginacée Cordia alliodora (5) puis dans une ascidie Aplidium constellatum (6). Ces deux composés présentent une cytotoxicité notable: CI₅₀ (KB) = 4,3 µg/ml et CI₅₀ (P388)=0,034 µg/ml pour la GHQ, CI₅₀ (KB) = 36 µg/ml et CI₅₀ (P388)=0,5 µg/ml pour le CCA. Ils possèdent de plus des propriétés antibactériennes dont les spectres d'activité sont donnés dans le Tableau 1. Si la cyclisation de la GHQ en CCA ne modifie pas l'activité antibactérienne, par contre elle diminue d'un facteur voisin de 10 la cytotoxicité. Les mécanismes d'action de ces deux types de propriétés sont donc probablement différents.Aucune activité n'était connue à ce jour pour le CCA. Des propriétés radioprotectrices avaient été attribuées à la GHQ (7-9), qui semblait de plus prévenir l'apparition de tumeurs spontanées ou le développement de tumeurs jeunes chez la souris et diminuer la fréquence de l'oncogenèse pulmonaire induite par le méthylcholanthrène. Ces différentes activités pourraient provenir, selon les hypothèses de Rudali et Menetrier (10), soit d'une action directe sur les cellules soit d'un effet immunologique. La mise en évidence de la cytotoxicité va dans le sens de la première de leurs hypothèses.